C'était la dernière journée de notre séjour d'une semaine sur Nosy Be, nous sommes fatigués par les nombreuses heures de bateau, les plongées multiples de ces derniers jours et surtout le manque de sommeil à cause de la musique des boîtes de nuit alentour qui ces dernières nuits a été particulièrement forte

. Aujourd'hui, l'eau est encore bien chargée et seuls les derniers mètres sont clairs.
L'un des nôtres s'est fait charger par un bouledogue de belle taille 2 jours auparavant

, il est monté du fond directement sur lui et a fait 1/2 tour 1m50 avant l'impact au grand soulagement de l'intéressé ... Tous évidemment gardons cette histoire en tête et ça pollue quelque peu nos descentes ! Même si d'autres rencontres plus agréables ont eu lieu, tel que la chance de croiser un jeune requin baleine d'une dizaine de mètres entouré de ses pilotes rémora et accompagné d'un escadron de bonites énervées...
On recherche l'eau claire et enfin nous la trouvons

. Chacun descend dans le bleu dans un désordre organisé, espérant secrètement la rencontre d'anthologie; le thazard, le barra de 25 kg aperçu dernièrement ou l'hypothétique thon à dents de chien !
Rien de particulier se passe, mon coéquipier est démoralisé, il n'a fait aucun poisson aujourd'hui. Ce n'est pas qu'il n'en a pas vu mais pas dans la maille que nous nous sommes fixée. Ce dernier jour, on veut du beau, du lourd, du spécial, les descentes dans le bleu se suivent en rythme, chacun pour soi et les binômes s'éloignent sensiblement les uns des autres. Quand soudain : un appel suraigu sur ma droite que je perçois difficilement au début mais qui se fait de plus en plus appuyé et là, je comprends : " Espadon, Espadon". C'est tout, on ne sait pas s'il passe ou s'il a été fléché.
Je prends mes palmes à mon cou et je me dirige vers l'appel tous les sens aux aguets, je ne sais pas encore qui l'a émis.
J'arrive enfin sur les lieux après une vingtaine de mètres de palmage soutenu, je vois la bête fléchée au niveau de l'ouïe, impressionnante de grandeur. C'est mon pote qui l'a fait, il la tient au bout de 4 ou 5 m de drisse et l'espadon tourne assez rapidement autour de lui, difficile pour moi de rentrer dans le cercle, je sais que ce poisson est armé lui aussi

. Je ne comprends pas pourquoi mon pote le tient aussi bridé, l'injonction arrive, précipitée; "double-le vite, j'ai une pelote sur le moulinet". De fait, je comprends mieux l'urgence et je le rejoins au centre du cercle et j'aligne le bestiau, mon rythme cardiaque est à fond, le poisson n'arrête pas de faire des embardées et j'ai du mal à viser correctement ! Je lâche enfin le coup et, malheur, c'est dans le ventre que la flèche se plante Argh ! Quelle bille ! Je le bride à mon tour et comme un malheur n'arrive jamais seul, mon fil, mis à mal sur les patates de corail dans la matinée, se rompt ! Re-Argh !
On vient néanmoins d'être rejoint par nos autres compagnons de chasse et l'un arrive à rentrer dans le cercle et après plusieurs alignements place sa flèche là où il faut, le poisson est bulbé...
On le tient, on le prend dans les bras, il est à lui, à nous. Je retourne rapidement au bateau pour préparer sa venue et alerter les barqueiros.
Inutile de vous dire la largeur des sourires, l'ébahissement, la satisfaction, le plaisir ...

Ce n'est pas tant le but qui est important, mais aussi le chemin pris pour y parvenir. Adhérent FCSMP