Avec ma petite famille, nous sommes basés dans un camping à Tizzano. (Corse du sud)
ce jour là il fait très chaud, même très très chaud. C'est un des derniers jours ou on peut encore profiter,
car bientôt il faudra reprendre la route pour rentrer chez nous, les vacances touchant à leur fin.
on décide d'aller à la mer toute la journée, en famille.
je prends le matos de chasse, dans l'idée d'emmener mes filles pour une séance pmt + chassouille. Je pensais aller sur une petite
plagette super mignone du coté de Tizzano, faut prendre la voiture et rouler un peu mais pas trop.
Mais Djoussette ne l'entend pas de cette oreille, que néni! elle veut aller sur une plage super connue, et surement super fréquentée. Et en plus ya un peu de route, pas de clim, Ô chaleur...
je tente de faire changer d'avis la patronne, mais la négociation échoue. Bref, nous voilà en route pour cette plage.
On finit par arriver: du monde partout, la plage méga touristique avec les centaines de bateaux ancrés devant, je suis dégouté.
Je fais la gueule. les affaires de chasse restent dans le coffre de la bagnole.
Bon tant pis on va faire du serviette plage!

Bon on se baigne, l'eau est bonne, on mange le pic nique,
puis quand même, sur cette plage tout confort, (marchand de glace, bar, restau, etc) je vois sur la droite qu'il y a le début d'une cote rocheuse, vers laquelle je commence à faire les yeux doux. Je me dis: "doit pas y avoir de fond, en plus ya des bateaux ancrés partout", ça va être pourri, mais je décide sur les coup de 4h d'aller voir à pied et d'y jetter un coup d'oeuil.
Je prends donc le chemin littoral, et plus j'avance, sur ce chemin, plus je regarde les eaux cristallines, plus je me dis qu'il faudrait tenter de se mettre à l'eau par là. Quelque chose m'appelle, au fond, inexorablement.
Ni une ni deux, je retourne chercher le matos de chasse resté dans le coffre de la voiture, et m'équipe sur la plage devant les yeux effarés des touristes.
Et me voilà parti, enjambant serviettes de plage et autres obstacles, avec le 110 à la main, (acheté spécialement pour ces vacances en Corse, merci Abyss

il est 17 h. un mec fait du ski nautique pas loin, et juste devant, un gros voilier est au mouillage. Pas bon, faudra
être vigilant. et mon binhomme qui est reparti, rentré sur le continent depuis quelques jours. :/
J'avance un peu, d'abord le long de la cote. Dès les premiers mètres, je vois de
beaux éboulis. puis des blocs; et le poiscail est là. des gros bancs de sars, la mange partout, les castagnoles, c'est plein de vie, ça déborde même!
Je commence d'abord à chasser tout près du bord, mais le poisson est farouche. J'abandonne vite, et commence les
agachons sur 10 à 12 m. Et je vois des bancs de sars, et plus je descends plus les sars sont gros.
J'aperçois vite des sars qui doivent avoisiner peut-être les 2kg (maxi 1.5 kg on va dire, merci Poulp

d'en bas, je vois des blocs en face, j'avance, et décide d'agachonner dessus. je dois être à 30 m du bord. et là sur 14 m j'ai mon premier denti
qui me vient à l'agachon, tranquilement mais d'une nageoire sure, il ne doute de rien! il avance et semble dire "Eh Oh qui est sur mon téritouareu!" je me dis que je dois commencer à devenir bon, peut-être? c'est bien la
première fois qu'un denti me montre le bout de son museau!
Il s'arrête à 2 ou 3 m de moi, me regarde, il doit faire 1kg. je le vise, et ...ça me semble trop facile.
Il est là, devant moi, avec sa gueule de repris de justice, il me regarde. je repense à la maille fcsmp, la dessus mon denti me montre son plus beau
profil, et... je ne tire pas!
le denti se tourne deux fois, me regarde, là, juste devant moi, et puis, il s'en retourne tranquillement de là ou il était venu.
En remontant je vois que juste derrière, un pêcheur à la palangre à jeté sa ligne ici. Pour sur le coin semble bon, plus que bon même.
Pendant tout ce temps les bateaux tournent dans le coin, ça n'arrête pas à cette heure. Mais il y a des denti, vont pas me faire
chier non mais! le point positif est que la mer est plate "comme le cul d'une chinoise", alors ma bouée on la voit de loin. Si tant est qu'on sait à quoi ça sert...

Je dépasse rapidement la ligne du pécheur, posée par 15 à 25 m de fond, et la laisse loin derrière moi. Je ne veux pas troubler la pêche des pros.
bon j'abrège un peu, je passe sur le sar de 2kg allez on va dire 1.2 kg à la louche

je remonte, avec toujours un peu l'angoisse de ce que je vais trouver, en perçant la surface.
16 ou 17 m, ce n'est pas très raisonnable, je vous l'accorde, sans la présence d'un coéquipier qui vous
assure et surtout surveille la plaisance. Question apnée, ça va. Jamais fleurté avec les limites, je remonte
à chaque fois très propre, pas essouflé, loin de la "zone rouge". mais le danger est présent, partout.
ce sont les embarcations diverses qui parfois ne passent pas très loin. Parfois, quand j'entends un bruit se
rapprocher, je préfère prolonger l'agachon et attendre que le bruit s'éloigne.
dans ces conditions, chasser moins profond n'aurait pas changé grand chose aux conditions de sécurité.
Bref je m'égare, revenons à nos dentis.

Partout ce sont des secs, dont le sommet pour certains est déjà à 15 m de fond. Partout des éboulis, des
tombants splendides. Et partout de la vie, la mange, les sars qui rodent en bancs. Sur un des secs,
je repère une faille à coté d'une autre plus profonde, et me dis que je vais me caler dans celle du haut, moins profonde donc. Je ne veux pas présumer de ma forme, et choisis la facilité.
Je descends dessus, bien ventilé, j'ai la patate, encore aucun signe de fatigue, ça doit faire une petite heure que je chasse, à ce moment là.
En descendant, sur cette faille, je me rends compte qu'elle ne pourra pas me cacher.
Je décide alors de décale et continue la descente sur la faille plus profonde.
J'ai abandonné le plomb de bouée, dont je me servais comme lest variable. je ne palme plus, et je coule, je coule, je coule encore. Je finis par me poser au fond de la
faille, à 18 m, dans l'ombre. et là, qu'est ce que je vois devant moi? Il arrive avec sa gueule de bagnard, il joue des épaules et avance, sur de lui. Il semble dire "c'est moi, j'arrive garez vos miches"
Putain qu'il est beau, il pèse quoi? 6kg? 8kg? j'hallucine, merde, J'HALLUCINEEEEEUUUUU!!!!!

Il s'avance donc, et bien avant d'être à porté de tir, j'entends un jet ski qui passe au dessus... j'ai un mouvement de tête incontrôlé au même moment. Le denti l'entend aussi, il a du aussi, certainement, percevoir mon mouvement de tête. et Il fait demi tour et se tire en quatrième vitesse, vers des fonds à 25 , 30 m....
Adieu, splendide denti, je ne t'ai pas tiré, mais ton image reste gravée là, dans un joli coin de ma tête, à jamais.
Voilà... je suis remonté. sans poisson, dédaignant les quelques rougets que j'ai vu en repartant vers le bord, mais je ressors de l'eau avec quelque chose d'autre:
ça y est. C'est fait... je suis atteint... je crois le mal incurable. J'ai le virus du denti!
j'ai son écaille brillante qui luit au fond de mes yeux, tu ne les vois pas ?

A un moment, sur ces fonds, j'ai eut des frissons. au cours d'une remontée, en voyant ce qu'il y avait autour de moi. Ce n'étaient pas des frissons de froid. En surface, l'eau était à 27, et la thermocline était gentille comme tout.
C'étaient des frissons d'émotion, procurés par ces cathédrales sous marines, des fonds comme j'en avais rarement vus avant. c'était une émotion comme on peut en ressentir devant certains spectacles naturels,
ou en entrant dans certains hauts lieux architecturaux, comme on peut en voir par exemple en Toscane.
j'ai encore tenté quelques agachons, un peu plus loin, mais j'ai du me raisonner pour ne pas pousser mes incursions plus profond. Je comprends maintenant, comment on peut se laisser entrainer vers le fond, pris
par cette fièvre de chasse...
Ah, Perce Que Dalle! pourquoi étais tu déjà reparti sur le continent!

j'y suis retourné le lendemain. les sars étaient là, mais furtifs. Il m'a semblé revoir les denti, de loin, mais il ne m'ont pas approché.
Voilà, pas de poisson embroché, pas d'exploit, mais je voulais partager ça avec vous, mes chers spearboy.
car c'est à ce jour un de mes plus beaux souvenirs de chasse!
edit en rouge: révision des estimations de poids du sar à la baisse merci rouget merci Poulp!