Souvenir d’autrefois…
Publié : jeu. nov. 06, 2008 9:35 pm
il y a plusieurs mois, avec Rataxes nous avions travaillé sur un projet qui nous tenait à cœur : essayer de faire The CR.
Après un début prometteur ou l’euphorie était omni présente, la vie a repris le dessus. Voici donc nos dernières élucubrations
Le concerto de la Brocouille, ou « le Rata et les Sortilèges »
***
J’ai pourtant tout tenté.
Le crescendo, après un instant de suspension, reprend et déchire, d’un long cri de soprane, le paravent de ma désolation : tout en moi m’abandonne, fuit, et semble renoncer – aurai-je la force de surmonter tant d’épreuves et de doutes ?
Des signes avant-coureurs auraient dû m’alerter. J’aurais dû comprendre, depuis le début, ce lent glissement du destin.
Epuisé, désarmé, le chœur ne tremble plus. Et ce n’est plus le chant, c’est le silence qui se prolonge dans les ténèbres. Tout, soudain, voudrait s’éteindre avec cette défaite. Mais, plus fragile qu’un pétale fané porté par la brise, la voix d’une enfant relève le drapeau, et redonne un nom, un visage, un corps, au désir de vivre. Pourtant, l’heure n’est pas encore venue.
Je me souviens de la première fois. A l’automne dernier. Je m’étais dissimulé le trouble d’un tel événement. Parfois, la malchance nous rassure !
Mais aujourd’hui je ne le sais que trop bien : les inconstances de la chance n’y étaient pour rien. Une force plus terrible, obscure, venait de me marquer de son premier fer. Je ne m’appartenais déjà plus.
Dans le deuxième mouvement, moins lyrique, le chœur cherche un appui à sa résignation. Entremêlées, les voix se dispersent confusément et s’épuisent, sans soutien ni unité.
La deuxième fois, j’ai cru devoir agir par moi-même, en procédant à toutes sortes d’artifices, pour me prémunir contre de nouveaux échecs. Mais on ne triche pas avec ces puissances-là. Peu à peu, j’ai dû me rendre à l’évidence : seul, la défaite n’était plus seulement probable, elle devenait certaine.
Il me fallait trouver le secours d’un mage exorciste, d’un grand maître des sortilèges, capable d’affronter avec moi l’assaut des puissances de l’ombre.
Bien sûr, j’ai d’abord cherché localement, j’ai consulté toutes sortes de rebouteux, féticheurs, nécromanciens, devins, charlatans, marabouts, astrologues… Mais ces gens, on le sait bien, ne sont que des profanes… comment leur expliquer l’essence même de notre quête de la pure vacuité transcendante ultradimensionelle et polycosmique, quand eux-mêmes ne savent embrasser que les mains du diable ?
Je pressentais dès l’origine qu’aucun ne saurait me sauver, ni même comprendre la nature de cette malédiction d’un autre ordre. Cela, en effet, ne relevait plus désormais d’aucune mesure humaine.
Le troisième et dernier mouvement annonce le rassemblement des dernières forces. Après les premières mesures comme en écho à la confusion du mouvement précédent, le chœur converge vers une seule voix. La détermination du rythme rappelle celle des esprits, et conduit l’ensemble vers un seul but. Mais, dans un crescendo final, la tonalité majeure, décidée, passe étrangement en mineur : en effet, les dernières forces jetées en avant, cette folie désespérée ne semble annoncer qu’une fin plus précoce, et pressentie. Le mouvement se termine brutalement, sans solution, abandonnant chacun à son incertitude.
Où LE trouver ? Où trouver cet être supérieur, capable de m’arracher aux mains de l’infortune et de la malédiction ? Qui serait celui qui, me prenant sous son aile, saurait intercéder pour moi auprès des grands esprits de l’invisible et de l’insaisissable ?
Je n’ai pas longtemps cherché cet oiseau rare. Mais dois-je aujourd’hui considérer la réussite rapide de mes recherches comme un signe supplémentaire de ma déchéance ? Je n’oserais le dire. Cependant…
Par hasard, ouvrant pour la énième fois le traité sur le néant de Saint Jean du Madrépore l’ancien (manuscrit original par ses treize disciples), celui-là même, on s’en souvient, qui m’avait permis de faire mes premiers pas dans la voie nouvelle que je m’étais choisie ; par hasard, donc, je suis tombé sur cet étrange marque-page :
Après un début prometteur ou l’euphorie était omni présente, la vie a repris le dessus. Voici donc nos dernières élucubrations
Le concerto de la Brocouille, ou « le Rata et les Sortilèges »
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J’ai pourtant tout tenté.
Le crescendo, après un instant de suspension, reprend et déchire, d’un long cri de soprane, le paravent de ma désolation : tout en moi m’abandonne, fuit, et semble renoncer – aurai-je la force de surmonter tant d’épreuves et de doutes ?
Des signes avant-coureurs auraient dû m’alerter. J’aurais dû comprendre, depuis le début, ce lent glissement du destin.
Epuisé, désarmé, le chœur ne tremble plus. Et ce n’est plus le chant, c’est le silence qui se prolonge dans les ténèbres. Tout, soudain, voudrait s’éteindre avec cette défaite. Mais, plus fragile qu’un pétale fané porté par la brise, la voix d’une enfant relève le drapeau, et redonne un nom, un visage, un corps, au désir de vivre. Pourtant, l’heure n’est pas encore venue.
Je me souviens de la première fois. A l’automne dernier. Je m’étais dissimulé le trouble d’un tel événement. Parfois, la malchance nous rassure !
Mais aujourd’hui je ne le sais que trop bien : les inconstances de la chance n’y étaient pour rien. Une force plus terrible, obscure, venait de me marquer de son premier fer. Je ne m’appartenais déjà plus.
Dans le deuxième mouvement, moins lyrique, le chœur cherche un appui à sa résignation. Entremêlées, les voix se dispersent confusément et s’épuisent, sans soutien ni unité.
La deuxième fois, j’ai cru devoir agir par moi-même, en procédant à toutes sortes d’artifices, pour me prémunir contre de nouveaux échecs. Mais on ne triche pas avec ces puissances-là. Peu à peu, j’ai dû me rendre à l’évidence : seul, la défaite n’était plus seulement probable, elle devenait certaine.
Il me fallait trouver le secours d’un mage exorciste, d’un grand maître des sortilèges, capable d’affronter avec moi l’assaut des puissances de l’ombre.
Bien sûr, j’ai d’abord cherché localement, j’ai consulté toutes sortes de rebouteux, féticheurs, nécromanciens, devins, charlatans, marabouts, astrologues… Mais ces gens, on le sait bien, ne sont que des profanes… comment leur expliquer l’essence même de notre quête de la pure vacuité transcendante ultradimensionelle et polycosmique, quand eux-mêmes ne savent embrasser que les mains du diable ?
Je pressentais dès l’origine qu’aucun ne saurait me sauver, ni même comprendre la nature de cette malédiction d’un autre ordre. Cela, en effet, ne relevait plus désormais d’aucune mesure humaine.
Le troisième et dernier mouvement annonce le rassemblement des dernières forces. Après les premières mesures comme en écho à la confusion du mouvement précédent, le chœur converge vers une seule voix. La détermination du rythme rappelle celle des esprits, et conduit l’ensemble vers un seul but. Mais, dans un crescendo final, la tonalité majeure, décidée, passe étrangement en mineur : en effet, les dernières forces jetées en avant, cette folie désespérée ne semble annoncer qu’une fin plus précoce, et pressentie. Le mouvement se termine brutalement, sans solution, abandonnant chacun à son incertitude.
Où LE trouver ? Où trouver cet être supérieur, capable de m’arracher aux mains de l’infortune et de la malédiction ? Qui serait celui qui, me prenant sous son aile, saurait intercéder pour moi auprès des grands esprits de l’invisible et de l’insaisissable ?
Je n’ai pas longtemps cherché cet oiseau rare. Mais dois-je aujourd’hui considérer la réussite rapide de mes recherches comme un signe supplémentaire de ma déchéance ? Je n’oserais le dire. Cependant…
Par hasard, ouvrant pour la énième fois le traité sur le néant de Saint Jean du Madrépore l’ancien (manuscrit original par ses treize disciples), celui-là même, on s’en souvient, qui m’avait permis de faire mes premiers pas dans la voie nouvelle que je m’étais choisie ; par hasard, donc, je suis tombé sur cet étrange marque-page :