JE VOUS AI MENTI !
En fait, tout le sens de ce voyage de pêche, c’était de revoir ces îles du large, et d’abord koh Tang, où j’allais chasser quand j’étais lycéen au Cambodge, il y a près de 40 ans.Depuis longtemps, je voulais y retourner. Y retourner avant qu’il ne soit trop tard. Avant que moi, je ne sois plus capable d’aller pêcher. Avant que ces îles que j’avais connues désertes, n’aient été englouties dans le développement touristique.
La première étape, c'était d'avoir rencontré Hubert : Apnéa avait publié, dans « le coin des fines flèches », la photo d’un gars qui avait pêché un cobia au Cambodge. Je le contacte, on échange par mail, et presque un an après, on se retrouve au Cambodge en février 2007. On pêche ensemble : cool, sympa, sans arrières-pensées ... Et là, malheureusement, on n’a pas pu aller aux îles du large : ces îles sont au-delà de la ligne des 20m. Il y a de la visi et du gros !.
Je suis rentré en France avant Hubert, qui lui est resté une semaine de plus : il a pu faire une sortie avec un Français du Cambodge, Jean-Claude L., qui possédait un bateau (avec 2 autres Français, ils ont acheté à 3 un bateau pour faire de la PSM). Une sortie formidable, de l’eau claire, et un tombant, derrière un ilot, qui descendait à 25m …
On est repartis cette année, pour aller aux îles du large. Pour moi, c’était revoir enfin koh Tang, partir au pays du Souvenir. Mais ce que je cherchais, je ne l’ai pas reconnu.
Pour cette expédition, on doit partir avec Jean-Claude et son bateau, mais le bateau a été vendu ! A force de contretemps et d’indisponibilités du bateau, Jean-Claude et ses 2 associés en ont eu marre et l’ont vendu. Mais bien sur, l’expédition est maintenue.

Hubert a été voir au village de pêcheurs :

il a trouvé un bateau. Et le prix est correct.
Alors jeudi soir, 20 mars, on part pour koh Tang et Poulo Way !
4 chasseurs : Jean-Claude L. Xavier R., Hubert et moi-même. Trois hommes d’équipage, et Jean-Claude L. emmène sa cuisinière Cambodgienne.
On part à moto à Ream, à 20 km de Sihanoukville, pour chercher l’annexe, une coque de 5m avec hors-bord 40 CV, qui servira à faire la navette entre le bateau de base et les chasseurs. Hubert conduit la moto. Je suis passager, et j’ai vraiment la frousse, avec mon short et mes tonges ! Deux fois au moins, on descend dans le bas-côté, à cause des camions qui dépassent en face (bien entendu, hors de la ligne continue !) ! On a rendez-vous avec Xavier et Jean-Claude, qui arrivent de Phnom Penh. La route de terre, avec ses nids d’autruche, débouche sur un décor de cinéma : une grande baraque en planches grises, délavées par la pluie, au bord d’une baie isolée, fermée par une île. La bâtisse a servi de décor au film « Rempart contre le Pacifique » d’après l’œuvre de Marguerite DURAS, tourné en décembre 2007. C’est là que l’annexe est rangée. On met la remorque à l’eau, dans l’anse déserte. Je pars avec Xavier, mais avarie à 300m du bord : le moteur tape un corail dans l’eau trouble, et s’arrête. Bougie cassée. Retour à la pagaie. Heureusement, on a le vent dans le dos. On arrive au bord ; la nuit tombe. On hisse l’annexe en haut de la plage, à 200m de la mise à l’eau. Des gardiens Cambodgiens sont venus nous aider. Heureusement, Jean-Claude a vu en partant, qu’on était plantés dans la baie. Il nous ramène à Sihanoukville dans son 4X4. On va au port, pour charger le bateau, mais l’avitaillement n’a pas été fait. On ne peut pas partir. On dort chez Quick (d’est dans son hôtel qu’on loge). Grosse pluie dans la nuit.
Vend 21 Mars : 7h00 au bateau !
On prend 200 l de mazout supplémentaires. Avitaillement en glace et bombonnes d’eau.

Les grands pains de glace sont livrés en mobylette, sur les chemins de planche des maisons sur pilotis. On décide de prendre 6 barres de 50 litres de plus, pour que les glacières soient remplies ras la gueule.
Quick nous rejoint avec son matos ! C’est une surprise, il a réussi à négocier avec sa femme in extrémis ! Ambiance de départ en colonie de vacances. Si l’on était partis la veille, il serait resté à son hôtel.

Chargement terminé : 7 glacières, le matos … prêts à partir enfin !
On appareille enfin à 9h10, en faisant un détour pour Ream où nous attend Jean-Claude L. , dans l’annexe. En face de la plage d’Ocheuteal, une courroie casse ! Je crois un moment que la sortie est foutue. Mais réparation en 10 minutes, et ça repart ! On récupère l’annexe à 11h35, et Jean-Claude avec ! Direction koh Tang ! L’eau change de couleur, des poissons volants : c’est l’eau du large !
Vers 13h30, le sommet de koh Tang apparaît à l’horizon. L’île grandit.
Je m’attends à une grande émotion, comme un moment magique, mais non …
On prépare le matos : déballer les arbalètes des sacs, ajuster le filin des flèches …
A 16h10, on jette l’ancre devant la côte, en face de gros blocs. Visi : plus de 20m!
Eau bleue. Mer lisse. De gros éboulis propres … Pas de courant.
Je n’ai jamais été dans ce coin là ; il y a 40 ans, on me laissait dans des coins calmes … Ces coins exposés, on pouvait y faire de mauvaises rencontres, et c’était pas de la blague !
Xavier se pose sur des fonds de 10-12m. A sa troisième apnée, un gros poisson vient le voir. Un cobia ! Tir, flèche tordue, il le maitrise, appelle l’annexe, qui l’embarque et l’amène au bateau. Immédiatement, le poisson est vidé, et coupé en 2 pour rentrer dans la glacière ! 23 kg vidé : donc, près de 30 kg !
Je prends un bec de cane empereur : je descends vers 12m, il vient de la droite et passe tout droit, sans dévier quand je m’approche. Environ 5 kg ; tir facile, alors que c’est un poisson très méfiant ; pas autant que le denti, mais pas loin !
Quick prend d’entrée une belle carangue bleue à 6 bandes grises, d’environ 5 kg.
On sort de l’eau au coucher du soleil. On mange sur le bateau. Sophie, la cuisinière Cambodgienne de Jean-Claude, nous a soignés. Et après le roquefort (sur du pain de campagne !), à 21h00, on appareille : Le bateau vogue vers Poulo Way, tandis que l’on s’installe sur nos matelas et qu’on essaie de dormir à la clarté de la pleine lune.
On ancre vers 1h00, entre les deux îles, à 200m de la côte.
Oui, on mange bien … très bien. Jean Claude a veillé au ravitaillement. Vin Chilien, fromage … Sophie, sa cuisinière, est un vrai cordon bleu. Et elle parle Français, ce qui aide bien pour se faire comprendre par l’équipage.
A suivre ...
Si tu donnes à quelqu'un un poisson que tu as volé, il mangera une fois.
Si tu lui apprends à voler, il mangera toute sa vie
Philippe GELUCK